Youtube - "N'en parlons plus" : avec Sarah, sur les traces de son grand-père harki pendant la guerre d’Algérie
nouveau numéro de reporter plus le magazine de reportage long format de France24 nous vous invitons aujourd'hui
à suivre la douloureuse quête de vérité d'une femme sur les origines de sa famille lorsque Sarah âgée de 30 ans
devient mère elle décide de briser l'omerta imposé par son père fils de Archy Archy c'est ainsi que l'on appelle
les Français originaires d'Algérie qui ont combattu au côté de l'armée française contre l'indépendance de l'Algérie avant 1960
après l'indépendance les archis qui ne sont pas massacrés s'enfuiti en France mais le sort qui leur est réservé parqué
dans des camps est tellement scandaleux que la France a longtemps préféré le taire le film puissant et mouvant que
nous allons vous présenter témoigne de l'histoire d'une famille Archy comme il y en a eu tant d'autres vous allez le découvrir en ouverture il a remporté de
très nombreux prix dans les festivals documentaire c'est sa première diffusion à la télévision il est signé Cécile
kindria et Vittorio [Musique]
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vous en faisiez des en Algérie oui mais c'est pas c'est pas le F comme
C de maintenant c'est quoi c'est le vrai c'est les feuilles c'est parce que ça vient d'où le hîné et ben pas chez nous
VI les autres V pas chez nous mais c'est quoi c'est les feuilles des arbres que
tu brois non c'est pas des arbres de comme l'Herb comme ça il pousse par
terre ouais après on coupe les feuilles des sèch mais pas beaucoup beaucoup chez
nous on achète vient les Arabes il viennent sur le chamau ramène on achète
ouis ah ouais oui non on paye avec le le blé ouais c'est pas on donne pas de l'argent
ou don ouais ah mais les G avant de la Guer ou
mais après la guerre et la guerre si j'ai le courage comme le les
ça va mais maintenant me reste rien du tout j'ai docteur j'aiqué la mort la
mort la mort elle m'a dit non madame besoin de VOUS
j'ai dit non non non non non non non mais a raison non
ou il y a quelques mois Marie est né mon premier
enfant et avec elle on ressurgit certaines questions qui m'empêchent de garder le silence
celui de mon père algérien fils de
[Musique]
Archy un mot qu'on ne prononce qu'à demimot dans ma famille réfugié en
France dans les années 60 tout comme le mobias le camp où elle
s'est retrouvé internée en arrivant [Musique]
ici c'est une nécessité absolue que enfants le sachent qui la découvre quand
je serai plus là non non non non non non non c'est trop tard parce qu'ils ont peut-être ils ont peut-être des
questions à te poser il faut qu'il sacheent je veux pas leur mettre la haine en fait parce que moi quand on me
raconte que voilà mes parents on leura fait ça on leura fait ça et tu imagines
à cet âgeel à 14 ans oui bien sûr à 14 ans c'est trop jeune mais maintenant il faut qu'il sache en plein
adolessence la vérité il faut la dire il faut l'écrire il faut la dire il faut faut que non seulement tes enfants tes
petits enfants la connaissent mais il faut que le monde entier sache comment nous avons été traités ça s fait s vous
ça fait ve allez bon ça y est mamie elle est fatiguée
[Musique]
je suis désolée de rouvrir vos blessures mais j'ai besoin que vous me rendiez un peu de ce passé qui est après tout aussi
le mien [Musique]
il faut tout d'abord rappeler qu'on venait de quitter 6 années de de vie infernale en
Algérie on était loin loin loin loin d'imaginer après avoir tout perdu tout
perdu tout qu'and allit nous enfermer dans des camps c'était des des camps
assist à des meurtres à des meurtres à coup de ha à coup de pistolet à coup
de pardon pardon j'ai fini j'ai fini
merci je parle tout qu'est-ce làb je fin plus
jamais mais merci le courage il a donné le courage des milliards de fois mais si c'est
maintenant je peux pas je peux
pas pardon mamie nen parlons plus
[Musique]
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[Applaudissements]
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je sais peu presque rien de mon grand-père Amar il est mort quand j'avais 13
ans que lui est-il arrivé en Algérie à la fin de la guerre lorsque le FLN a
triomphé et que les Français ont désarmé l'archie abandonné à leur
sort que s'estil passé lorsqu'il s'est réfugé en France pourquoi personne ne veut se
souvenir de Bias
le camp de Bias l'endroit où les espoirs de ma famille ont été anéantis une
dernière fois
bonjour Dalida bonjour je me présente je m'appelle Sarah ma famille a vécu dans le camp de de Bias et en fait je viens à
la rencontre des gens pour essayer de comprendre un petit peu l'histoire et tout ce qui s'est passé j'aurais voulu
savoir si on pouvait discuter et oui mais finalement j'ai réfléchi depuis votre appel et je préfère en
parler bonjour madame bonjour bonjour je m'appelle Sarah
dfour madame je m'appelle Sarah djafour je
suis la petite je VZ ben je suis la petite fille de Madame jafour et je viens je viens quce tu veux je viens
rencontrer les gens qui vivent ici un petit peu je peux pas vous poser quelques
questions non non non non à qui j'ai raconté quelque chose rieni à rien m mes
enfants je raconé
[Musique] pas est là il est
là est
[Musique]
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bonjour Mohan Mohan ou je peux rentrer
oui V vas-y qui je m'appelle Sarah jafour je suis la petite fille de de
Madame jafour ah oui je connais je peux m'installer là ouais vas-y vas-y insttoi
j'arrive alors qu'est-ce qu' nous cette visite bah alors en fait je viens à la rencontre un petit peu des gens qui ont
vécu iciis dans le camp et je crois que tu as beaucoup beaucoup de de choses à me raconter sur le camp pour bah pour en
apprendre un petit peu plus sur ma famille et ah ouais j'ai connu ta famille j'ai connu ça parti d'ici en
1975 je crois 75 ou 76 76 ils sont partis d'ici ouais ouais ouais à la
fermeture de soi-disant des camp mais qui des camp qui n'ont jamais fermé h puisque j'habite encore tu tu arrives tu
me trouvais encore ici h ouais ouais parce que toi tu as toujours vécu ici ben j'ai toujours vécu ici depuis euh
depuis le 17 septembre 1963 et quand elle est arrivé faisait sambbres et tout et bias
ouais il faisait sombre il y avait rien le petit logement qu'on nous avait octroyé il y avait rien mon père est
allé dans dans un bâtiment qui avait vers le fond là-bas ils lui ont donné des housses qui fallit remplir de
pailles il est revenu avec ses pailles et heureusement on avait quelques bougies à la maison parce qu'il y avait
pas d'électricité donc on a passé la nuit comme ça mon père il est venu avec des des trucs comme ça je lui dis mais
comment on va dormir dessus m'a dit quand il va monter ça va s'aplatir donc on a dormi sur ces paillasses et mais
ces paillasses on les a gardé jusqu'en 1968 le premier truc qui m'avait dérangé
moi le soir premier soir on a été accueilli par des punaises il y avait plein de punaises il
y en avait ça grouillit de partout on était obligé de dormir avec la bougie à il fallait surveiller que la bougie elle
te met pas le feu à la paille et tout c'est la misère quoi les qui ont vécu
des drames un peu partout mais ici c'était le pire le compte de bien c un hôpital psychiatrique à ciel ouvert tu
as des souvenirs toi en Algérie tu en as beaucoup ah oui parce que nous ouais c'est des souvenirs il sont dur
parce que il y a eu ma famille avait été massacré et tout alors donc c'est ouais
c'est des trucs j'ai pas envie de teop raconter quoi d'accord et et juste à ce que tu tu sais parce que c'est quelque
chose moi qui me qui m'intrigue c'est pourquoi ton père lui comment ton père il s'est retrouvé avec l'armée
française non mais justement c'est suite à l'attentat qu'il a eu dans notre village là ils sont venus à massacrer ma
famille le FLN est venu à massacrer ta famille oui pour rien quoi ils sont venus les ont sortis de la mosquée les
il ont encor j'aié des membres de ma famille mon père lui ont tiré dessus pour rien donc ils ont autorisé l'armée
française à s'installer là-bas s'implantter ils sont implanté donc ils ont créé une arc rien ne me dit que ce
n'est pas l'armée française qui envoyé ces ces gens qui se disent qui se disaient du FLN pour que l'armée
française puisse s'installer dans notre village peut-être qu'il a fallu cette
manipulation mais bon tout ça bon je je sais pas trop raconter le truc parce que bon tu arrives on est en train de taper
le café j'ai pas toutes mes idées en
jusqu'à hier j'étais convaincu que toutes ces portes me resteraient fermées mais grâce à la rencontre avec Mohand
elle commence doucement à
s'entrouvrir bonjour Cader bonjour Sarah enchanté bienvenue à toi merci de bien
vouloir me recevoir bonjour madame c'est un plaisir ben j'ai appris que ta venue
c'était un peu pour partir sur la mémoire de tes grands-parents c'est ça ici au camp de Bias ouais c'est ça on
ben écoute c'est bien franchement c'est c'est c'est bien voilà parce que moi
comme je dis mes enfants ils onont pas ce courage là ils acceptent pas qu'on disent que son grand-père c'était un traître eux ils prennent le mot traître
dans la gueule et et eux ils ont pas de répondant alors alors ils préfèrent ne
pas en parler et MO se réfugier derrière c'est ça concernait mon grand-père
ça marche merci de bien vouloir me recevoirin alors j'ai j'ai parlé à ma
grand-mère il y a de TR jours elle m'a dit j'avais une seule amie au camp de Bias c'était madame tamazun et ben voilà
donc ma grand-mère Fatma voilà elle vous
embrasse tu comprends un petit peu le pas trop elle elle te dit qu'elle
qu'elle a travaillé beaucoup avec elle dans les champs qu'elle a un grand V ici puisquelleelle on était voisins ici
c'est des choses dans famille on parle pas beaucoup hein moi je sais que mon père je pense qu'il a occulté beaucoup
de choses pour pour pour avancer et oui je pense que ton papa il t'a pas
peut-être qu'il te l'a pas transmis comme il voudrait te la transmettre parce qu'elle était ce qu'on a subi
c'est c'est quelque chose de de tellement tellement violent quoi et
c'est dur à expliquer c'est sûr que moi j'ai déjà du mal à l'expliquer à mes enfants il y avait des des meurs
en direct il y avait des enfants qui subissaient des traumatismes déjà c'est
un traumatisme d'être interné dans un con et en plus on subissait des choses à
l'âge de allez 67 ans moi j'ai encore mémoire de bagarre se terminer oui avec
une balle dans la tête par exemple ouais mon traumatisme moi céit une personne une dame qui avait été tuée une nuit de
33 coups Coutau je crois ouais une dame il stait acharné le bonhomme sur elle
elle avait été assassinée la nuit le matin on avait compris que 33 de couteau 33 coup de couteau je mémoire j'étais
gamin ils ont laissé pratiquement un bâtiment entier de personne déséquilibré
psychisme complètement limite pourquoi il y avait des meurtres ils savaient que ces
gens-là ils étaient capables de te tuer c'était des gens de pédophilie
c'était des violeurs c'était des gens malades qui avaient tout pour commettre
ces fait et on les a laissé là au milieu d'enfant les gens pourquoi ils sont
armés mon père la seule chose qu'il avait c'était de mettre son fusil de le
charger le soir de le mettre à côté de son lit oh
pas n'est pas un village comme les autresas n'est pas en Algérie mais en
lotgaron là vivent des archis que la France a recueilli ils ont fondé une
véritable communauté qui ressemble étrangement à celle qu'ils ont quitté
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ton père et le mien sont venus en même temps les jafour on est venu en 68 ouais on est passé par le château de Laour
dans le gar et on a atterri ici voilà tous ces bâtiments si tu veux de là-bas de derrière la bute jusqu'au bout
c'était l'administration comme je t'ai dit le le dispensaire médical les
professeurs et tout là-bas c'était les écoles les bâtiments ressemblait à des bâtiments comme dans les grandes
concentration l'architecture était exactement la même il y avait deux trois ok ça allit pour les familles tu te
rends compes les familles qui étaient 7 une dizaine il y en avait il y avait quatre ou CIN enfants par par piole il y
avait un petit gasinière pour faire à manger les toilettes étaient dehors c'était enfin c'était un salut enfin bon
avec les barbelet autour h et une surveillance aussi au portail et tout il
manquait plus que les mirador ah oui oui au portail et tout et puis les lumières hop et puis hop instinction des feux en
éteigné même à l'intérieur des maisons et donc avec ton père tes deux frères et ta mère non ma mère elle est restée ta
mère elle est resté en Algérie abandonné en elle était pour l'Algérie elle était pour l'Algérie algérienne alors c'est ça
en 68 elle est revenue ici en 2004 37 ans après elle est venue en France elle
est venue en France le contact a été assez difficile parce que si tu veux elle se rapprochait
beaucoup de moi mais là je pense je je parle de quelque chose assez tactile et moi j'ai refusé parce que je lui ai fait
comprendre après je lui ai parler je lui ai fait comprendre que moi c'était plutôt certaines éducatri on jou le rôle
de de la maman de substittu on peut dire ça comme ça mais par je lui en voulais
pas je lui en voulais pas mais je voulais quand même garder toi cette distance parce que mon père en a bavé quand même quand il est arrivé ici
c'était la désolation totale
[Musique]
ça te plaît de vivre en France ou tu aurais pas préféré rester en Algérie non non là c'est M c'est mieux
en France dis-moi pourquoi parce que là c'est M parce que là-bas FL le FLN
là-bas tu avais peur du FLN oui tu te plais ici
oui tu préfères être ici ou être en Algérie en Algérie oui tu étais à quel
endroit en Algérie pourquoi tu préféré l'Algérie mon pays
l'Algérie je vais te montrer une photo où pour voir les conditions dans lesquelles il vivait alors c'est qu'une
pièce mais tu veux tu vois l'état des murs les les des truc comme ça tu tu tu
t'enapercevras tiens regarde je te l'ai sorti exprès ça c'était la cuisine du
CAN de Bias à l'époque alors là c'est ma maman c'est
ma mère d'accord là c'est mon beau-père et ça c'était notre cuisine à l'époque tu avait rien on avait droit au niveau
de l'État du bureau à une douche par semaine comment ça se passait c'était
quoi des douches où tout le monde c'était comme dans les gymnases tout le monde tout le monde au même endroit et puis voà tout le monde au même endroit
on se douchait dans ce bâtiment été comme hiver hein quand tu penses que c'était quand même un hangar imagine
l'hiver honnêtement c'était vraiment le système militaire fermé il faut savoir que toute démarche il fallait euh un
référé au bureau même pour un mariage il fallait demander l'autorisation euh moi
je me rappelle que j'avais un frère qui habitait qui habitait à l'extérieur et pour qu'il vienne voir ma mère il
fallait que ma mère demande l'autorisation au bureau j'avais 15 ans quand j'ai su que j'avais des oncles et
des des cousins quelque part au camp de Bias aucun étranger ne rentrait
euh il y avait aucun étranger qui avait le droit de rentrer on était entre
nous alors ça y est vous êtes je français vous êtes français vre
femmeussi est-ce que ça veut dire que vous vous ne vous sentez plus algérien non non pas du tout plus du tout non je
sens bien que je suis français pour le moment ne plus penser à l'Algérie être français ces phrases là entendu un peu
partout dans le camp n'était pas un constat bien sûr seulement un souhait exprimé au présent dans l'espoir qu'il
se réalisera plus vite le temps qu'il y faudra c'est le problème actuel des anciens archis et c'est aussi notre
problme puisque nous les avons pris en
charge
ir c la
V on y va on
rentreou vra voil on est arrivé à bias je croyais que
j'étais retourné en Algérie ma mère elle commencé à dire y parce qu'elle était contente et mais moi j'étais pas content
ils nous ont rejeté tu prépares un petit café
etclam c'est ma fille celle qui a 14 ans c'est la dernière au qu de bien j'ai
rencontré des Mohamed j'ai rencontré Ali Omar et tout bon ah j'aurais
pas et ben on nous met en Der Descamp il nous ont mis dans des camps comme
indigènes pas comme des Français pas comme des immigrés parce que les immigrés on les a mis dans les HLM et
leurs enfants ils allaient dans l'école républicaine nous on était même pas considéré comme des des des immigrés on
était indésérabl on a été accepté par force parce que c'est des sousofficiers
qui nous ont ramené par force parce que Monsieur de Gaul et son gouvernement ils
nous ont rejeté ils nous ont désarmé il nous a mis le couteau du FLN sous la
gorge et le voilà notre problème pourquoi on est on est comme ça pourquoi que quel est ce mal qui nous range qui
nous range voilà
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est-ce que vous désirez garder la nationalité française oui monsieur le juge oui monsieur le oui monsieur
oui monsieur le jug et votre femme voulez-vous lui
oui monsieur le
jugge c'est Ben
Ahmed c'est un sacré danseur ah il adoré ça ou ah mais c'éit un sacré record ah
il il aimit danser le rock c'est incroyable merci
beaucoup de de de l'garonais je dirais même pas de français de l'garonais ne savaiit pas qu'il y avait
un camp dans le lgard' et ça c'est c'est c'est quelque
chose on nous a caché on dirait qu'on avait on dirait qu'on avait la peste
tous nos parents sont devenus alcooliques mon père buvait et beaucoup d'autres pour noyer
le CH pour noyer le Chagin pour pour dire mais qu'est-ce que j'ai fait à la France pour mon père il a dû se dire
qu'est-ce que j'ai fait à la France pour être là et est-ce que tant qu'on est sur l'Algérie est-ce que parce que pour moi
ça c'est quelque chose qui est j'ai jamais su et peut-être que je saurai jamais hein mais les
conditions pour lesquelles ou dans lesquel votre papa ou vos pères
respectifs se sont engagés pour l'armée française il y a plein de raisons que
que nos parents il y en a qui on a égorgé leur leur famill devant eux il y
en a que qui ont on a violé une personne de la famille tout ça plein de choses
comme ça qui ont fait que certaines personnes ont été obligé de s'engager moi j'avais ma grand-mère qui chercher
de l'eau dans un puit au chemin du retour il y a les minitair Français qui
l'ont ramené jusqu' chez elle avec la jeep donc les voisins quand ils ont vu
ça ils on déduit que c'était une comment dire collabor avec eux donc le soir ils
sont venus ils l'ont pendu devant sa maison donc quand mon père est arrivé
qu'il a vu sa mère pendu comme ça devant chez elle il allait directement s'engager dans avec
lesarchis voilà à savoir que aussi j'ai un
demi-frère du côté de ma mère lui il avait 18 ans et demi 19 ans et lui il
était FN voyez quand la guerre d'Algérie est tragique tragique c'est-à-dire que mon
père était arqui et j'ai un frère qui était FLN
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parmi les images d'archiv cela me touche de découvrir les visages de ce que je
[Musique] rencontre soudain ces visages cessent
d'être des archives et deviennent les compagnons d'enfance de mon père les voisins de ma famille
[Musique]
à l'époque mamie avait mon âge à peine 30 ans mon père en avait h et autour de
lui c'estes huit frères et sœurs étaient aussi des
enfants là il y avait l'école l'école mais c'est l'école entre nous hein oui oui ou je dire tu moi j'ai Allis une
demi-journée à l'école c'est pas normal que j'aille qu'une demi-journée nous on croyait être dans une cité euh aller à
l'école avec les Français quoi avec les petits français tout ça non non non c'était pas ça j'avais pas l'impression
qu'on allait à l'école il y avait deux classes alors les niveau il savaiit plus trop comment les faire on était avec
celui qui avait 14 ans celui qui avait qui en avait 7 8 tout ça mélangé on était dans une école fermée qui nous
rendait euh illétré irresponsable et elle nous intégrait pas donc comment vous
voulez-vous que demain qu'on devient des gens cultivés et des gens intégrés ce
qui faisait surtout c'est que arrivé à 14 je sais plus si c'est 14 ans ils
enlevaient le il venaient enlever la le le fils le le fils et le mettaient au
centre de Moumour un centre de redressement c'est même pas un centre une école c'est un centre de
redressement et ce ce centre de redressement même si l'enfant n'avait rien fait il y a le
directeur du conamp qui est à l'époque Monsieur boucher et convoque mes parents vis-à-vis de moi dis à mes parents vous
savez pourquoi vous êtes là aujourd'hui dit non voilà votre votre votre enfant
va devoir vous quitter puisque je vais j'ai décidé de le placer dans une dans une structure dans un centre euh parce
qu'il fait trop de bêtises ma maman a réagi tout de suite en lui disant mais mais pourquoi il mon
fils ne fait rien il n'a rien fait de mal il a et il lui dit si il a cassé un
carreau et mon père lui dit non mais l'heure de question mon fils ne partira pas c'est c'est heure de question il lui
dit bon et devant le refus de mon père il a commencé à être menaçant le directeur du camp l'a menacé de beaucoup
de choses pour le faire euh pour que pour qu'il signe
et un moment de un geste de colère il a tapé sur la sur la table
et un geste de dépit il a compris que il sera qu'il était obligé de s'exécuter
[Musique] et et moi dans la douleur j'ai j'ai vu que mon père allait cédé il a cédé il a
signé le fameux papier pour que je sois emmené dans C structure beaucoup euh ont
commenca à voir que ce ce directeur du camp nous manipuler manipuler surtout
les anciens puisque nous n étent encore des jeunes adolescents et ils voyaaient qu'ils avaient pas leur droit qu'ils
touchaient pas toutes leur pension et quand des archis se révoltai ben c'était
directement le centre psychiatrique et il y en a beaucoup qui se sont retrouvés à la candellie alors c'est un centre hospitalier psychiatrique c'était leur
solution la candellie quand ils arrivaient pas à maintenir une autorité
candelli une contestation canandelli une femme on voulait lu enlev ses enfants al
leur a dit non on n'avait pas menlever mes enfants et quand ils ont voulu la prendre de force
elle avait préparé de l'huile je croisalco Bré ou de l'alcool à brûlé l'alcool brûlé et ils ont forcé la porte
et quand ils ont forcé la porte ben leura jeté sur sur le visage des gendarmes et il a amené à la candi on l'
infiltré je ne sais pas trop quoi piquer avaler je ça revenait soit légumes euh
soit complètement déglingué quoi c'est c'est et puis les autres qui restaient sur le camp pour éviter que ça arrive
ces révoltes là et cetera ils avaient aller s cacher là mon père il s'est rebellé il a été mis à la candéie et ben
il y avait mon frère qui était le plus grand mon frère boussade pu son âme il est décédé maintenant et il n il nous
racontait qu'il qu'il était en train de de jouer au au foot et il voit cette
ambulance arriver et des hommes habillés en blanc le prendre le mettre dans l'ambulance et
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jusqu'au jour où on a eu l'âge de dire bon ben ça suffit nous voulons vivre
autre chose et je leur ai dit ben on va brûer l'école pour que déjà faire
disparaître cette école qui nous a rendu
unalphabè et en même temps ça nous permettra aux jeunes d'aller à l'école dans les communes à
voisinante je suis rentré dans l'école j'ai mis j'ai V dgéri
j'avais une boî d'alim je m'amusais comme ça j'avais oublié que j'étais dans au
milieuac la première S pas allumé la deè s pas
laèend lui fais leé Mme pas j'étais entouré de en plus
le G qui explosé ave puis d' se coup je plonge par la
fenêtre et je suis sorti et et après
pour sortir du Ren je n'arrivais pas à trouver le trou il y avait le voisin à côté il avait berellement le chien
commencé à Boyer quand il a entendu Bou il a commencé wou wouh l'autre il sort au f au f Il aprè la force à force on a
trouvé le trou on parti chacun il est rentré chez lui bon j'étais brûlé un peu
les mains j'avais les cheveux brûlés j'avais les genoux brûlés il y avait les gensarmes qui sont passés devant chez moi j'avais les mains dans lespuches
demandez pas de vous serer la main j'ai pas envie aujourd'hui je suis en colère on a brûlé la classe où j'étais à l'école et tout je suis pas
content et puis voilà et puis après l'école l'
fermé et jusqu'à présent c'est resté comme
ça c'est pas facile il sort pas trop du sujet hein il sort pas trop du
[Rires] sujet depuis hier soir 23h quatre
travailleurs immigrés algériens sont détenus par une dizaine de jeunarquy masqué et armé de fusil de chasse à
canonciers on obéit et commenz d'abord il faut obéir dans la vie avant Deon
justement on ou on a trop oué ça fait TR ans qu'on oubl 1 ans qu'on ou c'est normal qu'il faut se réveiller quand
même non ça fait 1 ans qu'on vous ou les Aris sont assez aigres et en
veulent à ceux qui les ont mis dans le péin et je m'explique on leur a fait
croire et on leur a dit qu'ils étaient malheureux dans ce cas ceci était
faux c'est cette rébellion qui finalement a fait exploser le camp c'est grâce à elle que de nombreuses familles
comme la mienne ont pu partir d'autres ont découvert combien il était difficile après 15 ans de vivre en
dehors du camp et beaucoup ne sont jamais partis moi dans la grand ville
moi je sais pas lire je peux pas moi j'ai pas habitué moi dans le Grandville jamais je sortais moi
[Musique]
ceux qui ont accepté de me parler m'ont donné bien plus que ce que j'attendais mais pourtant m question n
faitaugmenter il m enfin possible de comprendre l'enfance que mon père a vécu en France
mais quel enfer ma famille avait-elle
fui coucou comment ça
va et toi oui ça va je la POS là tour de
l'autre côté est cont elle est contente est cont de voir comme ça ton
arrière grandmère ouais bon vous m'attendiez peut-être oui on va passer à
table hein il t'ont punit il t'ont mis à côté de moi hop là hop non mais sur le
ban c'est mieux bon ça va oui et toion mamie tu as
le bonjour de Madame tamazun merci tout le monde he au global hein ou
ouais madame c'était des amis et ben quel âge elle a maintenant elle elle doit avoir
le même même pour sa ça va comme toi il en reste
beaucoup à bi dans le camp de ce qui était le je pense est-ce que ça se voit
que c'était un camp ou pas oui oui oui ouiou maintenant mtenant non si non si tu sais pas c'est juste que les maisons
elles sont quand même es sont c'est pas des maisons c'est un peu lugubre quoi je suis arrivé le premier jour il pleuvait
c'est c'est des maisons elles sont pas ésolé es sont es sont toutes pareill elles sont pas
hyper qu'est-ce que c'est cette vidéo ça c'est AA Gasmi
aasmi il nous a raconté qu'il avait fait péter l'école que cétait lui qui avait mis le feux à l'école
ouis et moi on s'est ramené à l'école
j'ai j'avais une boî je m'amus comme ça j'avais oublié que j'étais dans
la prière la trè et ditu sors sors
sorsi c'est des choses qu'il fallait faire en fait ouiit de toute façon fallait tout fallait tout faire
sauter qu'est-ce qu'il y a mamie je suis contente avec ce que tu as fait d'avoir
vu tout le monde écoute moi aussi je suis content vous allez retourner là-bas ils savent bien
[Musique]
je sens que mon père me respecte pour ce que j'ai fait mais il pense toujours qu'il est inutile d'en parler pour lui
le passé appartient au passé mamie en revanche m'a dit avant
d'aller se coucher qu'elle était vraiment prête à parler merci pour ton courage mamie j'espère
que cette douleur finira par tous nous [Musique]
aider bon on va commencer ou vous êtes prêts est-ce que je vous pose quelques questions sur l'Algérie votre enfance
commence par bon mamie du coup je vais te poser des questions sur l'Algérie surtout de ce
que tu te rappelles et donc voilà tu tu me dis si tu as pas envie de répondre à certaines choses tu
réponds pas de ce que tu te rappelles tu fais comme tu veux d'accord l'érie
l'Algérie on a passé la souffrance de l'enfer mais le Dieu il
est avec nous il m'a couragé
vous habitiez où c'était c'était où on vivait on vivait en kabili dans un petit village à 18 km de tizouou 18 19
km là c'est là-bas on regarde tout VO la porte on regarde jur Jura c'est la
montagne ouais c'est la montagne cétait un endroit magnifique on avait on avait on avait la la la nature pour nous tout
seul on avait on avait l'usine d'été mais couvert avec du CHUM et les et
l'arbre de grenadier il était juste derrière donc tu vois les les grenades qui pendai sur
le le toit de de chum c'était très beau ouais c'était beau
ouais est-ce que tu te tu te enfin tu sais pourquoi papi il a choisi de de
s'engager avec l'armée française qu'est-ce qu'il a poussé à faire ça et comment ça s'est passé après ça c'est
c'était une période difficile en fait ma maman elle était farouchement contre mon
papa disait qu'il éit obligé et cetera ça je je ce souvenir très précis cinq
fois sonans venus l'armée me prend j'ai dit jamais j'ai j'ai met le pied là-bas
jamais j'ai met le pied à C papi faisait partie des des des des gens du village le les plus riches sans doute donc il
était jalousé par sa propre famille et pas par n'importe qui par sa propre famille dont un de ses cousins qui était
efféine pendant la guerre donc ses cousins son onc et ses cousins voulent
le tuer pour lui prendre ses terres et Papi s'est engagé dans l'armée française
suite à ça et après PAP il m'a dit a tu viens pase pas dans ma maision j' n'ai
pas de mais où est-ce que je vais aller et ben faire PAP donc là à partir de cette période là
là donc ça a été la fin de la guerre en 62 si c'est le feu et à partir de là ah
notre vie a basculé le 22 juillet 1962 au crépesc les gens ils sont devenus fous euh homme femme et enfant tout le
monde est devenu fou il y avait des des expéditions punitive de sous forme de
défilé de de femmes flln pro FLN et étudiants pour le le mondequ
bientôt je sais pas qu'est-ce qu'ils ont décidé dans leur tête va faire pour nous
c'était plein des femmes des drapeaux algériennes l'Algérie aux Algériens sont venus à la
maison ils ont tout tout ce qu'on avait comme nourriture la semoule et tout ils
l'ont renversé par terre ils ont mis de l'eau pour qu'on le ouais pour ne pas le récupérer les tapis
les couvertures les tapis en l'autre il est arrivé F de traître et
cetera et cetera il m'a battu avec une extrême violence il attrappé un po les mains un
po les les bras les pieds il il Tom
comme ça par terre et la VO met le ça toute la nuit moi une
elle m'a pris dehors en dehors de la porte elle m'a pris par là me seré la gorge et
une elle est allée pour étouffer ton père elle a pris le cousin pour lui est dormu pour l'étouffer il y a ma
grand-mère maternelle qui se recroqu vilé dessus pour le protéger donc elle
lui doit la vie et il doit la vie à à ma grand-mère ton père après je me suis dit il avait peur du noir je dis après
est-ce que c'est pendant beaucoup de pendant longtemps il avait peur de
noir j'ai et et Papi il était où pendant ces
là à partir de 62 il a été mis en prison non d'abord dans ils ont fait des
travaux forcés d'abord d'ors il nous obligé à aller voir nos pères faire des travaux forcés leur jolliers qui leur
tapai dessus à coup de de crosses de fusil ou de de de gourdin quand ils avaient pas de fusil et on les voyait
tous tous tous tous tous avec d'énormes lèvres blanches parce qu'il leur faisait tous enlever les fies de barbarie avec
la bouche et lui le pauvre il a pas voulu me regarder dit ma fille je ne veux plus
que tu reviennes me voir je dis si je reviens te voir D non ma fille je t'aime
je veux pas que tu reviennes je veux pas que tu reviennes me
voir par ça Paron pardon par pardon de
quoi je t'ai fait pleurer comme ça
c'est pas toi c'est moi j'en ai plus que j'aille
chercher bah nous on savait que c'était pas possible pour nous de rester là donc on a organisé un plan d'évasion après je
l' raconté Mar à ma sœur elle m'a dit tout de suite tout de suite va
aller après j'aita non je peux pas je peis pas encore j'ai peur je vais
ramener le malheur pour le marier à ma sœur elle va condamner qu' par à cause
de moi il m'a dit je te dis en voer en VO aller si tu veux que je te je te
ramène jusqu'en France et il mamène qui voulait pas monter et lui s'est accroché
à sa grand-mère lui dit je reste avec toi et cette
scène et elle lui dit je suis vieille je vais mourir tu vas trop trop vite tout
seul il faut que tu pars avec ta mère et tes
frères lui non s'est accroché lui dit tu viens avec nous je pars
elle lui dit non moi je peux pas venir je reste je je garde la maison jusqu'à
ce que vous allez revenir ça c'est c'est terrible elle est morte
un an après elle est pas morte de maladie est morte de Chr ça y est ça y
est merci merci excusez-moi
c'est bon mamie c'est fini
oui pour pas
gaspiller pourquoi au restaurant
là je lui ai coupé le superur N pas il m'a dit pourquoi tu as fait ça je sais
pas pour économiser tu tes parentes tes parentes ça existe pas
ça mais j'ai jamais car je vais rester à cet âge là avec qu'est-ce qui s'est
passé sur moi mais si mais c'est comment bien ça il y en a plein il y a les femmes qui restent toute seul il y il y
en a il y en a beaucoup encore je sais je sais vous êtes plus résistante
ouais
[Musique]
et voilà pour ce document exceptionnel sur ces blessures encore profonde de la gerre d'Algérie plus de 60 ans après
l'indépendance merci d'avoir suivi cette émission on se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau numéro de
reporter sur France 24 [Musique]
Nouveau numéro de Reporters +, le magazine de reportage long format de France24, nous vous invitons aujourd'hui
à suivre la douloureuse quête de vérité d'une femme sur les origines de sa famille. Lorsque Sarah, âgée de 30 ans,
devient mère, elle décide de briser l'omerta imposée par son père, fils de Harkis. Harkis, c'est ainsi que l'on appelle
les Français originaires d'Algérie qui ont combattu au côté de l'armée française contre l'indépendance de l'Algérie avant 1960.
Après l'indépendance, les Harkis, qui ne sont pas massacrés, s'enfuient en France mais le sort qui leur est réservé, parqués
dans des camps, est tellement scandaleux que la France a longtemps préféré le taire. Le film puissant et mouvant que
nous allons vous présenter témoigne de l'histoire d'une famille Harkis, comme il y en a eu tant d'autres, vous allez le découvrir en ouverture, il a remporté de
très nombreux prix dans les festivals documentaires. C'est sa première diffusion à la télévision, il est signé Cécile
Khindria et Vittorio Moroni. [Musique]
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-Vous en faisiez du henné en Algérie ? - Oui mais c'est pas le henné comme
celui de maintenant. - C'est quoi ? - C'est le vrai, c'est les feuilles. - C'est parce que ça vient d'où le henné ? - Et ben pas chez nous
ça vient des autres villages, pas chez nous. - Mais c'est quoi, c'est les feuilles des arbres que
tu broies ? - Non c'est pas des arbres, c’est comme l’herbe qui pousse par
terre. – Ouais. - Après on coupe les feuilles et on les sèche, mais il y en n’a pas beaucoup chez
nous. On l’achète auprès des Arabes, ils viennent sur le chameau, ils le ramènent, et on l’achète.
-Ah ouais ? – Oui, nous on paie avec le blé. – Ouais. - On ne donne pas de l'argent, eux ils nous donnent le henné.
Ah mais ça c’était avant la guerre,
mais après la guerre… Si j’avais le courage comme à l’époque
ça va mais maintenant, il ne me reste rien du tout. Maintenant, j'ai dit au docteur je n’attends que la mort, la
mort, la mort, il m'a dit : « non madame Djafour, ils ont besoin de vous »
j'ai dit : « non non non non » - Mais si, il a raison. – Non…
Il y a quelques mois Marie est née, mon premier
enfant, et avec elle, ont ressurgit certaines questions qui m'empêchent de garder le silence,
celui de mon père, Algérien, fils de
[Musique]
Harkis. Un mot qu'on ne prononce qu'à demi-mot dans ma famille réfugiée en
France dans les années 60, tout comme le mot Bias, le camp où elle
s'est retrouvée internée en arrivant [Musique]
ici. - C'est une nécessité absolue que enfants le sachent. – Qu’ils la découvrent quand
je serai plus là. - non non non non, c'est trop tard, parce qu'ils ont peut-être des
questions à te poser, il faut qu'ils sachent. - Je veux pas leur mettre la haine en fait parce que moi quand on me
raconte que voilà mes parents on leur a fait ça, on leur a fait ça, et tu imagines
à cet âge-là, à 14 ans - Oui bien sûr à 14 ans c'est trop jeune, mais maintenant il faut qu'il sache. - En pleine
adolescence … - La vérité il faut la dire, il faut l'écrire, il faut la dire, il faut que non seulement tes enfants, tes
petits-enfants la connaissent, mais il faut que le monde entier sache comment nous avons été traités. - ça suffit s’il-vous-plait,
ça suffit. – C’est bon allez mamie elle est fatiguée.
[Musique]
Je suis désolée de rouvrir vos blessures, mais j'ai besoin que vous me rendiez un peu de ce passé, qui est après tout, aussi
le mien. [Musique]
-Il faut tout d'abord rappeler qu'on venait de quitter 6 années de vie infernale en
Algérie, on était loin, loin, loin, loin, d'imaginer après avoir tout perdu, tout
perdu, tout, qu’on allait nous enfermer dans des camps. C’était des camps où on
assistait à des meurtres, à des meurtres à coup de hache, à coup de pistolet, à coup
de…. – Pardon, pardon, j'ai fini, j'ai fini,
merci, désolée. Si je vous raconte tout, tout ce qui m’est arrivée là-bas et ici, en un an je finis
pas. Mais merci à Dieu, il m’a donné le courage et je l’ai remercié des milliards de fois. Mais là
maintenant, je ne peux pas, je ne peux
pas. - Pardon mamie, n’en parlons plus.
[Musique]
[Musique]
[Applaudissements]
[Musique]
Je sais peu, presque rien de mon grand-père Amar, il est mort quand j'avais 13
ans. Que lui est-il arrivé en Algérie à la fin de la guerre, lorsque le FLN a
triomphé et que les Français ont désarmé les Harkis, abandonnés à leur
sort ? Que s'est-il passé lorsqu'il s'est réfugié en France ? Pourquoi personne ne veut se
souvenir de Bias ?
Le camp de Bias, l'endroit où les espoirs de ma famille ont été anéantis une
dernière fois.
-Bonjour Dalida, bonjour je me présente je m'appelle Sarah ma famille a vécu dans le camp de Bias et en fait je viens à
la rencontre des gens pour essayer de comprendre un petit peu l'histoire et tout ce qui s'est passé. J'aurais voulu
savoir si on pouvait discuter. – Et oui mais finalement j'ai réfléchi depuis votre appel et je préfère ne pas en
parler. - Bonjour madame, bonjour, bonjour je m'appelle Sarah
Djafour madame je m'appelle Sarah Djafour… – Qu’est-ce que vous voulez ? - Je
suis la petite… - Qu’est-ce que vous voulez ? - Ben je suis la petite fille de Madame Djafour et je viens je viens… - J’ai dit qu’est-ce que tu veux. – Je viens
rencontrer les gens qui vivent ici un petit peu … je peux pas vous poser quelques
questions ? – Non, non, non, non, à qui j'ai raconté ces choses ? Rien, rien, même à mes
enfants je raconte pas.
[Musique] – Qui est là ?
Qui est là ?
[Musique]
[Musique]
-Bonjour Mohan, Mohan… - Oui. - Je peux rentrer ?
-Oui vas-y, c’est qui ? - Je m'appelle Sarah Djafour, je suis la petite fille de
Madame Djafour… - Ah oui je connais. - Je peux m'installer là ? - Ouais vas-y, vas-y, installe-toi
j'arrive. Alors qu'est-ce qui nous vaut cette visite ? - Bah alors, en fait, je viens à la rencontre un petit peu des gens qui ont
vécu ici, puis dans le camp et je crois que tu as beaucoup, beaucoup, de choses à me raconter sur le camp, pour bah, pour en
apprendre un petit peu plus sur ma famille et… - Ah ouais, j'ai connu ta famille, j'ai connu, ils sont partis d'ici en
1975 je crois, 75 ou 76. -76 - 76 ils sont partis d'ici ouais, ouais, ouais, à la
fermeture, soi-disant des camps, mais des camps qui n'ont jamais fermé, puisque j'habite encore tu arrives, tu
me trouvais encore ici .. ouais, ouais. - Parce que toi tu as toujours vécu ici ? - Ben j'ai toujours vécu ici depuis euh…,
depuis le 17 septembre 1963 et quand on est arrivé faisait sombre et tout… - Ici à Bias ?
-Ouais il faisait sombre, il y avait rien, le petit logement qu'on nous avait octroyé il y avait rien mon père est
allé dans, dans un bâtiment qu’il y avait vers le fond là-bas, ils lui ont donné des housses qui fallait remplir de
pailles, il est revenu avec ses pailles et heureusement on avait quelques bougies à la maison parce qu'il y avait
pas d'électricité, donc on a passé la nuit comme ça. Mon père il est venu avec des, des trucs comme ça je lui dis mais
comment on va dormir dessus, il m'a dit quand il va monter ça va s'aplatir donc on a dormi sur ces paillasses et mais
ces paillasses on les a gardé jusqu'en 1968. Le premier truc qui m'avait dérangé
moi, le soir, premier soir on a été accueilli par des punaises, il y avait plein de punaises, il
y en avait… ça grouillait de partout, on était obligé de dormir avec la bougie, il fallait surveiller que la bougie elle
te mette pas le feu à la paille et tout, c'est la misère quoi. Les Harkis ont vécu
des drames un peu partout, mais ici c'était le pire, le camp de Bias, c’était un hôpital psychiatrique à ciel ouvert. - Tu
as des souvenirs toi en Algérie, tu en as beaucoup ? - Ah oui parce que nous…, ouais c'est des souvenirs qui sont durs
parce que il y a eu ma famille [qui] avait été massacrée et tout, alors donc, c'est ouais,
c'est des trucs j'ai pas envie de trop raconter quoi. - D'accord et, et juste, à est-ce que tu sais parce que c'est quelque
chose, moi, qui me, qui m'intrigue, c'est pourquoi ton père, lui, comment ton père il s'est retrouvé avec l'armée
française ? - Non mais justement c'est suite à l'attentat qu'il a eu dans notre village là. – Ouais. - Ils sont venus massacrer ma
famille. - Le FLN est venu, à massacrer ta famille ? - Oui pour rien quoi, ils sont venus, les ont sortis de la mosquée, les
ont égorgés, j'ai des membres de ma famille, mon père on lui a tiré dessus pour rien, donc ils ont autorisé l'armée
française à s'installer là-bas, s'implanter, ils se sont implantés, donc ils ont créé une harka. Rien ne me dit que ce
n'est pas l'armée française qui a envoyé ces, ces gens, qui se disent, qui se disaient du FLN, pour que l'armée
française puisse s'installer dans notre village, peut-être qu'il a fallu cette
manipulation, mais bon tout ça, bon je sais pas trop raconter le truc, parce que bon tu arrives on est en train de taper
le café, j'ai pas toutes mes idées en place.
Jusqu'à hier j'étais convaincue que toutes ces portes me resteraient fermées, mais grâce à la rencontre avec Mohand,
elle commence doucement à
s'entrouvrir. - Bonjour Kader. - Bonjour Sarah. – Enchanté. - Bienvenue à toi. - Merci de bien
vouloir me recevoir, bonjour madame. - C'est un plaisir, ben j'ai appris que ta venue
c'était un peu pour partir sur la mémoire de tes grands-parents.. - C'est ça. - Ici au camp de Bias. - Ouais c'est ça.
-Ben écoute. C'est bien franchement c'est, c'est, c'est bien voilà parce que moi
comme je dis, mes enfants ils ont pas ce courage-là, ils acceptent pas qu'on dise que son grand-père c'était un traître, eux ils prennent le mot traître
dans la gueule et, et eux, ils ont pas de répondant alors, alors, ils préfèrent ne
pas en parler et se réfugier derrière « ça concernait mon grand-père ». Vas-y installe-toi là.
-Ça marche. Merci de bien vouloir me recevoir, alors j'ai, j'ai parlé à ma
grand-mère il y a deux-trois jours, elle m'a dit « j'avais une seule amie au camp de Bias, c'était madame Tamazount » - Et ben voilà.
-Donc ma grand-mère Fatma, voilà elle vous
embrasse. – [madame Tamazount parle arabe] - Tu comprends un petit peu le… ? - Pas trop. -Elle, elle te dit qu'elle,
qu'elle a travaillé beaucoup avec elle dans les champs, qu'elle a un grandit ici puisqu’on était voisins ici.
-C'est des choses dans la famille, on parle pas beaucoup hein, moi je sais que mon père, je pense qu'il a occulté beaucoup
de choses pour, pour, pour avancer. - Et oui je pense que ton papa, il t'a pas,
peut-être, qu'il te l'a pas transmis comme il voudrait te la transmettre parce qu'elle était, ce qu'on a subi
c'est, c'est quelque chose de, de tellement, tellement violent quoi, et
c'est dur à expliquer, c'est sûr que moi j'ai déjà du mal à l'expliquer à mes enfants il y avait des, des meurtres
en direct, il y avait des enfants qui subissaient des traumatismes, déjà c'est
un traumatisme d'être interné dans un camp, et en plus on subissait des choses à
l'âge de, allez 6-7 ans, moi j'ai encore mémoire de bagarre se terminer, oui, avec
une balle dans la tête, par exemple, ouais. Mon traumatisme moi, c’est une personne, une dame qui avait été tuée, une nuit, de
33 coups couteau, je crois, ouais une dame. Il s’était acharné le bonhomme sur elle,
elle avait été assassinée la nuit, le matin on avait compris que 33 coup de couteau, 33 coup de couteau, de mémoire j'étais
gamin. Ils ont laissé pratiquement un bâtiment entier de personnes déséquilibrées,
psychismes complètement, limite pourquoi il y avait des meurtres ? Ils savaient que ces
gens-là, ils étaient capables de te tuer, c'était des gens atteint de pédophilie,
c'était des violeurs, c'était des gens malades, qui avaient tout pour commettre
ces faits, et on les a laissé là au milieu d'enfants. Les gens pourquoi ils se sont
armés ? Mon père, la seule chose qu'il avait c'était de mettre son fusil, de le
charger le soir, de le mettre à côté de son lit, oh.
[radio] : Bias n’est pas n'est pas un village comme les autres, Bias n'est pas en Algérie mais en
Lot-et-Garonne, là vivent des Harkis que la France a recueillis, ils ont fondé une
véritable communauté qui ressemble étrangement à celle qu'ils ont quittés.
[Musique]
-Ton père et le mien sont venus en même temps, les Djafour on est venu en 68. - Ouais - On est passé par le château de Lascaux,
dans le Gard et on a atterri ici voilà. Tous ces bâtiments si tu veux de là-bas, de derrière la bute, jusqu'au bout,
c'était l'administration comme je t'ai dit, le, le dispensaire médical, les
professeurs, et tout là-bas c'était les écoles, les bâtiments ressemblaient à des bâtiments comme dans les camps de
concentration, l'architecture était exactement la même. Il y avait deux-trois pièces allez ok, pour les familles, tu te
rends compte, les familles qui étaient sept, huit, une dizaine, il y en avait, il y avait quatre ou cinq enfants par piaule. Il y
avait une petite gazinière pour faire à manger, les toilettes étaient dehors, c'était enfin, c'était insalubre, enfin bon
avec les barbelés autour et une surveillance aussi.. - Au portail et tout autour ? - Il
manquait plus que les miradors, ah oui, oui, au portail et tout et puis les lumières hop et puis hop extinction des feux, on
éteignait, même à l'intérieur des maisons. - Et donc avec ton père, tes deux frères, et ta mère ? - Non ma mère elle est restée. - Ta
mère, elle est restée en Algérie ? – Elle m’a abandonnée, elle était pour l'Algérie, elle était pour l'Algérie algérienne, alors c'est ça
en 68, elle est revenue ici en 2004, 37 ans après. - Elle est venue en France. - Elle
est venue en France, le contact a été assez difficile parce que si tu veux elle se rapprochait
beaucoup de moi mais là je pense, je, je parle de quelque chose assez tactile et moi j'ai refusé parce que je lui ai fait
comprendre, après je lui ai parlé, je lui ai fait comprendre que moi c'était plutôt certaines éducatrices qui ont joué le rôle
de, de la maman de substitut on peut dire ça comme ça, mais par contre je lui en voulais
pas, je lui en voulais pas, mais je voulais quand même garder cette distance, parce que mon père en a bavé quand même, quand il est arrivé ici
c'était la désolation totale.
[Musique]
-Ça te plaît de vivre en France ? – Oui. - Tu aurais pas préféré rester en Algérie ? – Non, non, là c'est mieux. - C'est mieux
en France. – Oui. - Dis-moi pourquoi ? - Parce que là c'est mieux, parce que là-bas le FLN.
-Là-bas tu avais peur du FLN ? – Oui. - Tu te plais ici ?
- Oui. - Tu préfères être ici ou être en Algérie. - En Algérie. – Oui, tu étais à quel
endroit en Algérie. – Kerba. - Pourquoi tu préférais l'Algérie ? - Mon pays
l'Algérie. - Je vais te montrer une photo, pour voir les conditions dans lesquelles ils vivaient, alors c'est qu'une
pièce, mais tu veux, tu vois l'état des murs les, les, des trucs comme ça, tu, tu, tu,
t'en apercevras, tiens regarde je te l'ai sorti exprès, ça c'était la cuisine du
camp de Bias, à l'époque. Alors là c'est ma maman, c'est
ma mère. - D'accord. - Là c'est mon beau-père et ça c'était notre cuisine, à l'époque tu avais rien, on avait droit au niveau
de l'État, du bureau, à une douche par semaine. - Comment ça se passait c'était
quoi, des douches où tout le monde… c'était comme dans les gymnases, tout le monde, tout le monde au même endroit, et puis … - Tout le monde au même endroit,
on se douchait dans ce bâtiment été comme hiver, hein quand tu penses que c'était quand même un hangar imagine
l'hiver, honnêtement c'était vraiment le système militaire fermé, il faut savoir que toute démarche il fallait euh en
référer au bureau, même pour un mariage il fallait demander l'autorisation, euh moi
je me rappelle que j'avais un frère qui habitait, qui habitait à l'extérieur et pour qu'il vienne voir ma mère il
fallait que ma mère demande l'autorisation au bureau. J'avais 15 ans quand j'ai su que j'avais des oncles et
des, des cousins quelque part. Au camp de Bias aucun étranger ne rentrait
euh il y avait aucun étranger qui avait le droit de rentrer. On était entre
nous. – Alors ça y est vous êtes ? – Je suis français. – Vous êtes français, votre
femme aussi ? – Et ma femme - Est-ce que ça veut dire que vous vous ne vous sentez plus Algérien - Non non plus du tout - Plus du tout – Non, je
sens bien que je suis Français pour le moment. Ne plus penser à l'Algérie, être Français, ces phrases-là entendues un peu
partout dans le camp n'était pas un constat bien sûr, seulement un souhait exprimé au présent dans l'espoir qu'il
se réalisera plus vite. Le temps qu'il y faudra c'est le problème actuel des anciens Harkis et c'est aussi notre
problème puisque nous les avons pris en charge.
On va devenir célèbres. On va devenir célèbres ?
Bon on les mets où les mégots ? – Ah bah tu les mets dans ta poche. – Oh bordel de merde
Allez on y va on rentre
Allez on y va on rentre. On est arrivé à Bias je croyais que
j'étais retourné en Algérie. Ma mère elle commencé à dire « Youyou » parce qu'elle était contente et mais moi j'étais pas content
ils nous ont rejeté. Tu prépares un petit café
Iclam. C'est ma fille, celle qui a 14 ans, c'est la dernière. Au camp de Bias j'ai
rencontré Mohamed. J'ai rencontré Ali, Omar et tout bon… - Je n’aurai pas du te rencontrer
Et ben ! On nous met dans des camps. Ils nous ont mis dans des camps comme
Indigènes, pas comme des Français, pas comme des immigrés parce que les immigrés on les a mis dans les HLM et
leurs enfants ils allaient dans l'école républicaine. Nous on n’était même pas considérés comme des des des immigrés on
était indésirables on a été acceptés par force parce que c'est des sous-officiers
qui nous ont ramenés par force parce que Monsieur De Gaulle et son gouvernement ils
nous ont rejetés ils nous ont désarmés il nous a mis le couteau du FLN sous la
gorge et le voilà notre problème. Pourquoi on est on est comme ça ? Pourquoi que… quel est ce mal qui nous ronge, qui
nous ronge ?! Voilà…
[Musique]
[Musique]
Est-ce que vous désirez garder la nationalité française ? - Oui monsieur le juge - Oui monsieur le juge ? - Oui monsieur le juge ?
Oui monsieur le juge ? Et votre femme voulez-vous lui … ?
Oui monsieur le juge
C'est Ben
Ahmed. C'est un sacré danseur ! Ah il adoré ça ouah mais c'était un sacré record. Ah
il il aimait danser le rock c'est incroyable. Merci !
Beaucoup de de de lot-et-garonnais, je dirais même de Français de Lot-et-Garonne ne savaient pas qu'il y avait
un camp dans le Lot-et-Garonne et ça c'est c'est c'est quelque
chose. On nous a caché on dirait qu'on avait on dirait qu'on avait la peste.
Tous nos parents sont devenus alcooliques. Mon père buvait et beaucoup d'autres - Pour noyer
le chagrin ? - Pour noyer le chagrin pour pour dire mais qu'est-ce que j'ai fait à la France ? Pour mon père il a dû se dire
qu'est-ce que j'ai fait à la France pour être là ? - Et est-ce que, tant qu'on est sur l'Algérie, est-ce que parce que pour moi
ça c'est quelque chose qui est j'ai jamais su, et peut-être que je saurai jamais, hein, mais les
conditions pour lesquelles ou dans lesquelles votre papa ou vos pères
respectifs se sont engagés pour l'armée française ? - Il y a plein de raisons que
que nos parents il y en a qui on a égorgé leurs leurs familles devant eux il y
en a que qui ont on a violé une personne de la famille, tout ça. Plein de choses
comme ça qui ont fait que certaines personnes ont été obligées de s'engager. - Moi j'avais ma grand-mère qui avait cherché
de l'eau dans un puit au chemin du retour il y a les militaires Français qui
l'ont ramenés jusqu' chez elle avec la Jeep. Donc les voisins quand ils ont vu
ça ils en ont déduit que c'était une comment dire… qu’elle collaborait avec eux. Donc le soir ils
sont venus, ils l'ont pendue devant sa maison. Donc quand mon père est arrivé
qu'il a vu sa mère pendue comme ça devant chez elle il allait directement s'engager dans… avec
les Harkis voilà. À savoir que aussi j'ai un
demi-frère, du côté de ma mère, lui il avait 18 ans et demi, 19 ans, et lui il
était FLN voyez comment la guerre d'Algérie est tragique, est tragique. C'est-à-dire que mon
père était Harki et j'ai un frère qui était FLN.
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Parmi les images d'archive cela me touche de découvrir les visages de ce que je
rencontre.
[Musique]
Soudain ces visages cessent d'être des archives et deviennent les compagnons d'enfance de mon père, les voisins de ma famille.
[Musique]
À l'époque, mamie avait mon âge, à peine 30 ans. Mon père en avait 8 et autour de
lui ses huit frères et sœurs étaient aussi des
enfants. - Là il y avait l'école. L'école mais c'est l'école entre nous hein ! - Oui oui. - Ouais je vais te dire tu… moi j'allais une
demi-journée à l'école. C'est pas normal que j'aille qu'une demi-journée. - Nous on croyait être dans une cité euh aller à
l'école avec les Français quoi avec les petits français tout ça. Non non non c'était pas ça j'avais pas l'impression
qu'on allait à l'école. Il y avait deux classes alors les niveaux ils savaient plus trop comment les faire. On était avec
celui qui avait 14 ans, celui qui avait qui en avait 7, 8, tout ça mélangé. - On était dans une école fermée qui nous
rendait euh illettrés, irresponsables et elle nous intégrait pas. Donc comment vous
voulez-vous que demain, qu'on devient des gens cultivés et des gens intégrés. - Ce
qui faisait surtout c'est que arrivé à 14, je sais plus si c'est 14 ans, ils
enlevaient le…, il venaient enlever la le le fils le le fils et le mettaient au
centre de Moumour un centre de redressement. C'est même pas un centre une école c'est un centre de
redressement. Et ce ce centre de redressement, même si l'enfant n'avait rien fait… Il y a le
directeur du camp qui est à l'époque Monsieur Boucher, il convoque mes parents vis-à-vis de moi. Il dit à mes parents « vous
savez pourquoi vous êtes là aujourd'hui ». Ils ont dit non. « Voilà votre votre votre enfant
va devoir vous quitter puisque je vais j'ai décidé de le placer dans une dans une structure dans un centre euh parce
qu'il fait trop de bêtises ». Ma maman a réagi tout de suite en lui disant « mais mais pourquoi il mon
fils ne fait rien il n'a rien fait de mal ». Il a et il lui dit « si, il a cassé un
carreau ». Et mon père lui dit non mais il est hors de question mon fils ne partira pas. C'est c'est hors de question ». Il lui
dit bon et, devant le refus de mon père, il a commencé à être menaçant le directeur du camp. Il l'a menacé de beaucoup
de choses pour le faire euh pour que pour qu'il signe.
Et un moment de, un geste de colère, il a tapé sur la sur la table,
et un geste de dépit, il a compris que il sera qu'il était obligé de s'exécuter.
Et et moi, dans la douleur, j'ai j'ai vu que mon père allait céder il a cédé il a
signé le fameux papier pour que je sois emmené dans cette structure. - Beaucoup euh ont
commencé à voir que ce ce directeur du camp nous manipulait, manipulait surtout
les anciens puisque nous on était encore des jeunes adolescents et ils voyaient qu'ils avaient pas leur droit qu'ils
touchaient pas toutes leur pension. Et quand des Harkis se révoltaient ben c'était
directement le centre psychiatrique. - Et il y en a beaucoup qui se sont retrouvés à la Candellie. Alors c'est un centre hospitalier psychiatrique c'était leur
solution, La Candellie. Quand ils arrivaient pas à maintenir une autorité :
Candellie. Une contestation : Candellie. - Une femme on voulait lui enlever ses enfants alors elle
leur a dit « non vous n’allez pas m’enlever mes enfants » et quand ils ont voulu la prendre de force,
elle avait préparé de l'huile je crois ou de l'alcool à brûler. -L'alcool a brûlé. -Et ils ont forcé la porte
et quand ils ont forcé la porte ben elle leur a jeté sur sur le visage des gendarmes et on l’a amené à la Candelli. On l’avait
infiltrée je ne sais pas trop quoi, piquer, avaler je… . Ça revenait soit légume, euh,
soit complètement déglingué quoi. C'est c'est et puis les autres qui restaient sur le camp pour éviter que ça arrive
ces révoltes là et cœtera ils avaient aller se cacher là. - Mon père il s'est rebellé il a été mis à la Candellie. Et ben
il y avait mon frère, qui était le plus grand mon frère Boussad, paix à son âme, il est décédé maintenant, et il nous il nous
racontait qu'il qu'il était en train de de jouer au au foot et il voit cette
ambulance arriver, et des hommes habillés en blanc le prendre, le mettre dans l'ambulance et…
[Musique]
[Musique]
[Musique]
Jusqu'au jour où on a eu l'âge de dire « bon ben ça suffit, nous voulons vivre
autre chose » - Et je leur ai dit ben on va brûler l'école. Pour que, déjà, faire
disparaître cette école qui nous a rendu
analphabètes et en même temps ça nous permettra aux jeunes d'aller à l'école dans les communes avoisinantes.
Je suis rentré dans l'école j'ai mis j'ai vidé le jerricane,
j'avais une boîte d'allumettes, je m'amusais comme ça. J'avais oublié que j'étais dans au
milieu. Tac, tac la première s’est pas allumée la deuxième s’est pas allumée,
La troisième elle a fait Boom. Là j’ai entendu « sors, sors ».
Faadi, il faisait le guet il m’a dit « sors, sors ».
J'étais entouré de flammes en plus
le gaz qui explose. Et puis d'un seul coup je plonge par la
fenêtre et je suis sorti. Et et après
pour sortir du Grillage je n'arrivais pas à trouver le trou. Il y avait le voisin à côté il avait viens voir le chien
commençait à aboyer quand il a entendu « Boom » il a commencé wouh wouh l'autre il sort il dit au feu au feu, Il… . Après à force à force on a
trouvé le trou. On parti… chacun il est rentré chez lui. Bon j'étais brûlé un peu
les mains, j'avais les cheveux brûlés, j'avais les genoux brûlés, il y avait les gendarmes qui sont passés devant chez moi, j'avais les mains dans les poches, je leur ai dit :
« demandez pas de vous serrer la main j'ai pas envie aujourd'hui, je suis en colère, on a brûlé la classe où j'étais à l'école et tout, je suis pas
content » et puis voilà. Et puis après l'école elle a
fermé et jusqu'à présent c'est resté comme
ça. C'est pas facile. - Aissa sort pas trop du sujet. – Hein ? - Ne sort pas trop du
sujet. – J’essaie de les impressionner.
Depuis hier soir 23h, quatre
travailleurs immigrés Algériens sont détenus par une dizaine de jeunes Harkis masqués et armés de fusils de chasse à
canons sciés. - On obéit et comme on sait d'abord il faut obéir dans la vie avant… - Non
justement on ou on a trop obéi ça fait 13 ans qu'on obéi, 13 ans qu'on obéi et c'est normal qu'il faut se réveiller quand
même non ça fait 13 ans qu'on vous obéi. - Les Harkis sont assez ingrats et en
veulent à ceux qui les ont mis dans le pétrin et je m'explique. On leur a fait
croire et on leur a dit qu'ils étaient malheureux dans ce cas. Ceci était
faux. - C'est cette rébellion qui finalement a fait exploser le camp c'est grâce à elle que de nombreuses familles
comme la mienne ont pu partir. D'autres, ont découvert combien il était difficile après 15 ans de vivre en
dehors du camp et beaucoup ne sont jamais partis. - Moi dans la grande ville,
moi je sais pas lire je peux pas moi. J'ai pas habitué moi dans le grande ville jamais je sortais moi.
[Musique]
Ceux qui ont accepté de me parler m'ont donné bien plus que ce que j'attendais. Mais pourtant mes questions n’ont
fait qu’augmenter. Il m’est enfin possible de comprendre l'enfance que mon père a vécu en France
mais quel enfer ma famille avait-elle
fui ? - Coucou comment ça va ? - Comment ça
va et toi ? - Oui ça va je vais la poser là de
l'autre côté. - Elle est contente. Elle est contente est contente de voir comme ça. - Ton
arrière-grand-mère ouais. - Bon vous m'attendiez peut-être. - Oui - On va passer à
table hein. - Ils t'ont puni ils t’ont mis à côté de moi. -Hop là, hop ! Non mets sur le
banc c'est mieux. Bon, ça va ? - Oui et toi ? - Bon mamie tu as
le bonjour de Madame Tamazount. - Merci tout le monde hein au global hein ou
ouais madame c'était des amis et ben quel âge elle a maintenant ? Elle elle doit avoir
le même même pour ça va comme toi. - Il en reste
beaucoup à Bias dans le camp de ce qui était le camp ? - Je pense est-ce que ça se voit
que c'était un camp ou pas ? - Oui oui oui oui. - Maintenant maintenant. – Non, si non, si tu sais pas, c'est juste que les maisons
elles sont quand même enfin c'est pas des maisons c'est un peu lugubre quoi je suis arrivée le premier jour il pleuvait
c'est c'est des maisons elles sont pas isolées elles sont elles sont toutes pareilles. Elles sont pas
hyper. Qu'est-ce que c'est cette vidéo ? - Ça c'est Aissa Gasmi.
Il nous a raconté qu'il avait fait péter l'école que c’était lui qui avait mis le feux à l'école
oui « - Et moi on s'est ramené à l'école
j'ai vidé la jerricane et j'avais une boîte d’allumette je m'amuse comme ça j'avais oublié que j'étais dans… [Rires].
Et il me dit j’ai entendu « sors sors ». Faadi il était dehors, il faisait le guet. »
C'est des choses qu'il fallait faire en fait. – Bah oui de toute façon fallait tout fallait tout faire
sauter. Qu'est-ce qu'il y a mamie je suis contente avec ce que tu as fait. D'avoir
vu tout le monde écoute moi aussi je suis content vous allez retourner là-bas ils savent bien.
[Musique]
je sens que mon père me respecte pour ce que j'ai fait mais il pense toujours qu'il est inutile d'en parler. Pour lui
le passé appartient au passé. Mamie en revanche m'a dit avant
d'aller se coucher qu'elle était vraiment prête à parler merci pour ton courage mamie j'espère
que cette douleur finira par tous nous aider
[Musique]
Bon on va commencer ou vous êtes prêts est-ce que je vous pose quelques questions sur l'Algérie, votre enfance.
Commence par mamie. - Bon mamie du coup je vais te poser des questions sur l'Algérie surtout de ce
que tu te rappelles et donc voilà tu tu me dis si tu as pas envie de répondre à certaines choses tu
réponds pas de ce que tu te rappelles tu fais comme tu veux d'accord. – L’Algérie…
l'Algérie on a passé la souffrance de l'enfer mais le Dieu il
est avec nous. Il m'a encouragé.
Vous habitiez où ? C'était c'était où ? - On vivait on vivait en Kabylie dans un petit village à 18 km de Tizi Ouzou, 18, 19km.
Notre village c’est celui-là et le Djurdjura c’est là-bas. On regarde t’ouvres la porte on regarde Djurjura. - C'est la
montagne. - Ouais c'est la montagne. - C’était un endroit magnifique on avait on avait on avait la la la nature pour nous tout
seul. - On avait on avait l'usine d'été mais couvert avec du chaume et les et
l'arbre de grenadier il était juste derrière donc tu vois les les grenades qui pendaient sur
le le toit de de chaume. C'était très beau ouais, c'était beau
ouais. - Est-ce que tu te tu te, enfin, tu sais pourquoi papi il a choisi de de
s'engager avec l'armée française qu'est-ce qu'il l’a poussé à faire ça et comment ça s'est passé ? - Après ça c'est
c'était une période difficile en fait. - Ma maman elle était farouchement contre mon
papa disait qu'il était obligé et coetera ça je je ce souvenir très précis. Cinq
fois sont venus l'armée me prendre j'ai dit « jamais j'ai je met le pied là-bas
jamais j'ai met le pied à la guerre ». Papi faisait partie des des des des gens du village le les plus riches sans doute donc il
était jalousé par sa propre famille et pas par n'importe qui par sa propre famille dont un de ses cousins qui était
FLN pendant la guerre. Donc ses cousins son oncle et ses cousins voulaient
le tuer pour lui prendre ses terres et Papi s'est engagé dans l'armée française
suite à ça. - Et après papi il m'a dit « si tu viens pas, tu restes pas dans ma maison ». Je n'ai
pas de maison, où est-ce que je vais aller ? Et bien rejoindre papi. Donc là à partir de cette période là
là donc ça a été la fin de la guerre, en 62, cessez-le-feu et à partir de là. -Ah
notre vie a basculé le 22 juillet 1962. - Au crépuscule les gens ils sont devenus fous euh hommes, femmes et enfants. Tout le
monde est devenu fou. - Il y avait des des expéditions punitives de, sous forme de
défilés de de femmes FLN, pro FLN et étudiantes. Beaucoup le le monde qui
bientôt je sais pas qu'est-ce qu'ils ont décidé dans leur tête va faire pour nous
c'était plein des femmes, des drapeaux algériens, l'Algérie aux Algériens, sont venus à la
maison ils ont tout tout ce qu'on avait comme nourriture : la semoule et tout ils
l'ont renversés par terre ils ont mis de l'eau pour qu'on le…ouais. Pour ne pas le récupérer les tapis,
les couvertures, les tapis en lin. - L'autre il est arrivé fils de traître et
coetera et cetera. Il m'a battu avec une extrême violence. Ils attrapaient un par les mains un
par les les bras les pieds ils ils ont tombé
comme ça par terre il a vomi le sang toute la nuit. - Moi une
elle m'a pris dehors en dehors de la porte. Elle m'a pris par-là m’a serré la gorge et
une elle est allée pour étouffer ton père. Elle a pris le coussin pendant qu’il dormait pour l'étouffer. - Il y a ma
grand-mère maternelle qui se recroquevillait dessus pour le protéger donc elle
lui doit la vie et il doit la vie à à ma grand-mère. - Ton père après je me suis dit il avait peur du noir je dis après
est-ce que c'est pendant beaucoup de, pendant longtemps il avait peur de
noir j'ai et - Et Papi il était où pendant ces
là à partir de 62. Il a été mis en prison ? - Non d'abord dans ils ont fait des
travaux forcés d'abord dehors. - Ils nous obligeaient à aller voir nos pères faire des travaux forcés leur geôliers qui leur
tapaient dessus à coup de de crosse de fusil ou de de de gourdin quand ils avaient pas de fusil et on les voyait
tous tous tous tous tous avec d'énormes lèvres blanches parce qu'il leur faisait tous enlever les figues de barbarie avec
la bouche. - Et lui, le pauvre, il a pas voulu me regarder. Il me dit « ma fille je ne veux plus
que tu reviennes me voir ». Je dis « mais si je reviens te voir ». Il me dit « non ma fille je t'aime
je veux pas que tu reviennes. Je veux pas que tu reviennes me
voir ». - Par ça. Pardon, pardon. - Pardon de
quoi ? - Je t'ai fait pleurer comme ça.
C'est pas toi c'est moi. J'en ai plus que j'aille en
chercher. - Bah nous on savait que c'était pas possible pour nous de rester là donc on a organisé un plan d'évasion après je
l’ai rencontré le mari à ma sœur elle m'a dit « tout de suite tout de suite on va y
aller ». Après j'ai dit « non je peux pas, je peux pas ». Encore j'ai peur je vais
ramener le malheur pour le mari à ma sœur. Elle va condamner qu'on part à cause
de moi. Il m'a dit « je te dis on va on va y aller si tu veux que je te je te
ramène jusqu'en France ». - Et il m’emmène qui voulait pas monter et lui s'est accroché
à sa grand-mère lui dit je reste avec toi et cette
scène. Et elle, elle lui dit je suis vieille je vais mourir tu vas trop trop vite tout
seul il faut que tu pars avec ta mère et tes
frères. Lui non il s'est accroché lui dit « tu viens avec nous je pars ».
Elle lui dit « non moi je peux pas venir je reste je je garde la maison jusqu'à
ce que vous allez revenir ». Ça c'est c'est terrible, elle est morte
un an après. Elle est pas morte de maladie, est morte de chagrin. - Ça y est ça y
est merci merci excusez-moi.
C'est bon mamie c'est fini.
Oui, pour pas
gaspiller [Rires] – Ordilla une fois en Espagne elle m’a engueulée. – Pourquoi ? - Au restaurant
là je lui ai coupé le sopalin et après elle m'a dit « pourquoi tu as fait ça ». J’ai dit « je sais
pas pour économiser ». Tu t’es marrante t’es marrante ça existe pas
ça mais j'ai jamais car je vais rester à cet âge-là avec qu'est-ce qui s'est
passé sur moi. - Mais si mais c'est comme à Bias ça il y en a plein il y a les femmes qui restent toutes seules. – Je sais
il y en a beaucoup encore je sais je sais vous êtes plus résistantes.
Ouais.
[Musique]
Et voilà pour ce document exceptionnel sur ces blessures encore profonde de la guerre d'Algérie plus de 60 ans après
l'indépendance. Merci d'avoir suivi cette émission on se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau numéro de
reporter sur France 24 [Musique]